La fabrication

Où l’on comprend les trois étapes-clés de la fabrication du rhum agricole, qui chez J.M s’enchaînent dans un espace limité, parfaitement agencé pour garantir la surveillance permanente et la maîtrise de ces métamorphoses de la canne à sucre par le distillateur et son équipe.

Etape 1 : LE BROYAGE  pour obtenir le jus de canne ou vesou


« La canne doit avoir le pied en terre et la tête au moulin », dit le proverbe créole. C’est le cas chez J.M : pendant la campagne, de mi-janvier à fin juin, deux camions déversent à tour de rôle, toutes les 20 mn, 8 tonnes de canne fraîchement coupée dans les champs de l’habitation Bellevue. Les chargements sont pesés et des échantillons sont prélevés pour vérifier la qualité de la canne récoltée.

La canne est broyée par les trois moulins, mûs par la vapeur jusqu’en 2012. Dans les deux derniers moulins, elle est arrosée par l’eau pure et naturelle de la rivière (imbibition) pour une meilleure extraction. Les nouveaux moulins électriques installés en 2013 permettent une extraction optimale, pure et raffinée. Le jus de canne ou vesou est ensuite filtré dans un filtre rotatif pour éliminer les impuretés, avant d’être envoyé dans les cuves de fermentation. La bagasse, résidu sec de la canne est utilisée pour alimenter la chaudière générant la vapeur nécessaire à la distillation et pour fertiliser les plantations : rien ne se perd, tout est recyclé.

Le jus a bonne odeur et bon goût, c’est le cœur du rhum agricole. Ses arômes fruités (où domine le litchee) et floraux (de fleurs blanches, de pivoine et de mimosa poudré) enrichissent son délicieux goût de sucre. Il exhale même une légère note ozonique, qui évoque l’air marin salé que respire la canne. Son odeur rappelle le paysage volcanique surplombant l’océan dans lequel pousse la canne chez J.M.

C’est parce qu’il est fabriqué directement à partir du jus de canne que les qualités aromatiques du rhum agricole sont incomparables avec celle du rhum industriel fabriqué à partir de la mélasse, sous-produit de la fabrication du sucre. Le rhum agricole, fabriqué essentiellement dans les Antilles Françaises et représentant 10% de la production mondiale de rhum, préserve toute la subtilité des arômes végétaux.

Etape 2 : LA FERMENTATION  pour transformer le vesou en vin de canne


Lors de la fermentation, sous l’action des levures, le sucre se transforme en alcool. Chez J.M, du pont supérieur, le responsable a les 7 cuves de fermentation (de 2300 litres) à l’œil ce qui lui permet de maîtriser parfaitement cette étape cruciale pour le goût du rhum.
A la surface, le vesou bouillonne puis frémit, puis se calme doucement : dès qu’il s’endort et reste tout à fait tranquille (on parle de « cuves mortes »), il faut arrêter la fermentation immédiatement sous peine de voir se développer des notes aromatiques désagréables (esters).

Le vesou fermente de 24 à 36 heures, à une température de 28° à 29°. Les levures (des saccharomyces, levures de boulanger) sont introduites à mi-cuve. La fermentation dégage une odeur agréable. La qualité des souches des levures est également un des secrets du goût du rhum.

Le vin titre de 3,5% à 5% vol. C’est lors de la fermentation que naissent certains arômes, arômes de pain d’épices par exemple, que l’on ne retrouvera que dans les rhums vieux.

Etape 3 : LA DISTILLATION pour métamorphoser le vin de canne en rhum


La distillation est le cœur de la fabrication, elle transforme le vin en alcool blanc, c’est elle qui agit comme le révélateur des arômes.

La distillation J.M se fait dans la plus pure tradition du rhum agricole martiniquais, avec un savoir-faire transmis de génération en génération et un matériel traditionnel: deux colonnes créoles en cuivre. Les différents plateaux en cuivre qui composent les colonnes permettent la rencontre de la vapeur d’eau et du vin de canne. De cet échange, sortira en haut de la colonne une vapeur d’alcool qui, une fois refroidie, donnera naissance au rhum. Cristallin, il titre alors chez J.M entre 70% et 73% vol. Pendant la campagne, 8000 litres de rhum sont fabriqués par jour en moyenne, qui seront transférés le lendemain dans une cuve de maturation.

Dans la distillation s’exprime toute l’expérience, tout l’art du distillateur qui révèle et concentre les arômes. Nazaire Canatous est distillateur depuis 1980. Son père, distillateur avant lui, lui a transmis tout son savoir-faire et ses secrets ; il lui disait : « Nazaire, la distillation, c’est comme la clarinette, on apprend tous les jours, tous les jours on trouve de nouvelles notes ! ». Nazaire dit le vérifier encore tous les jours.